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Eglise catholique Saint Georges Orgue Delorme-Koenig

Orgue de l'Eglise Saint Georges

Historique

L’église St Georges située dans la vieille ville de Sarre-Union, « Bouquenom » abrite un orgue qui mérite le détour par la beauté de son buffet, de ses jeux et aussi son histoire. Le buffet qui compte parmi l’un des plus beaux du pays s »&lève au fond de la nef presque jusqu’au sommet de la voûte. Il est admirable tant par l’élégance harmonieuse de ses formes que par la richesse de ses sculptures : anges musiciens au sommet des tourelles du grand-orgue, têtes expressives sous les mêmes tourelles. Sur celles du positif, les écussons armoriés rappellent la maison souveraine, au centre celui du duc de Lorraine, à gauche celui du duché de Bar (uni au duché de Lorraine) et à droite c’est celui des princes d’Orléans et sans doute les désignant comme les donateurs.

1. L’œuvre de Pierre Delorme

Si l’on sait que la partie instrumentale est du frère Delorme, nulle part n’est mentionné le nom de l’ébéniste sculpteur. Mais on peut penser que c’est là l’œuvre de la famille Mastersteck ébénistes et doreurs établis à Bouquenom depuis 1712 au moins, le nom du père Jean-Michel étant souvent cité dans le livre de comptes de la paroisse. De plus un certain nombre de ses œuvres montrent une ressemblance avec le buffet comme la monumentale chaire de Reinheim. Tout porte donc à croire que le buffet est dû à Jean Michel Martersteck. La partie instrumentale, on le sait, a été construite par Pierre Delorme (ou De Lorme) frère convers dans la congrégation des chanoines réguliers comme il est mentionné sur son acte de décès. Originaire d’Orléans où il est né le 27 juillet 1666, il est arrivé à Sarre-Union vers Noël 1715, peut-être invité par le chanoine de Kiecler curé de la paroisse. C’est ainsi qu’il travaille à la construction de l’orgue toute l’année 1716 pour l’achever probablement au printemps 1717. Ce magnifique instrument qui comme l’indique la composition possédait 15 registres au grand-orgue, 8 au positif et 4 à la pédale est d’esthétique française, avec quelques particularité régionales.

Composition de l’orgue de 1717

Grand-orgue Positif Pédale
Bourdon 16 Bourdon 8 16’
Montre 8 Montre 4 Flûte 8
Bourdon 8 Nasard 2 2/3 Trompette 8
Prestant 4 Doublette 2 Clairon 4
Grosse tierce 3 1/5 Tierce 1 3/5
Nasard 2 2/3 Fourniture
Doublette 2 Cymbale 3r
Quarte 2 Cromorne 8
Tierce 1 3/5 Voix Humaine 8 ?
Fourniture 3r
Cymbale
Cornet
Trompette 8
Clairon 4
Angélique
Resté à Bouquenom, Pierre Delorme semble particulièrement attaché à son œuvre. Même s’il n’est mentionné comme organiste qu’à partir de 1720, il est probable qu’il le fut avant. En outre, il avait pour charges d’entretenir, accorder et réparer son orgue, ce qu’il fit jusqu’à sa mort le 11 mai 1728, ayant probablement ajouté un nouveau jeu au positif.

2. Après Delorme

- Après son décès ce fut d’abord Jean Adam Dingler ou Dengler, natif de Bouquenom et ouvrier de Silbermann qui continua les travaux d’accordement.
- En 1730, l’orgue est nettoyé suite à des travaux de plâtrage à la voûte de l’église par un facteur dont on ignore le nom.
- En 1734 J. von Esch démonte l’orgue et le remet en bon état
- En 1735 c’est Dingler qui intervient
- En 1754, des travaux d’agrandissement de l’église nécessitent le démontage de l’orgue confié à Huberti, mais en 1756 ce sera de nouveau Dingler qui remontera l’orgue sur la nouvelle tribune et effectuera les réparations nécessaires.
- Quelques petites réparations sont effectuées jusqu’à la fin du siècle : en 1770 par Jacob Stirnmann, en 1780-1781 par Jacques Eckmann de Neu Saarwerden et en 1788 par Michel Verschneider de Puttelange
- Il survécut à la Révolution, mais l’absence d’entretien rendit nécessaires des travaux en 1814
- En 1865 l’orgue du frère Delorme, qui avait traversé le XVIIIe et la première moitié du XIXe sans trop de dommages, est remplacé par un instrument neuf du facteur Joseph Géant de Haute Vigneulles près de Faulquemont en Loraine, installé dans le magnifique buffet heureusement conservé.
- Au début du XXe siècle un relevage est envisagé, avec des modifications… et ce fut la guerre de 14-18 et la réquisition des montres en 1917.
- Il fallut attendre 1936-1937 pour que les montres soient réinstallées par le facteur Henri Vondrasek de Sarre-Union qui transforma la traction mécanique en traction pneumatique et modifia la composition et l’étendue des claviers.
- La deuxième guerre mondiale endommagea le buffet, des éclats d’obus touchèrent une des jouées

3. La résurrection

Après la guerre, Jean-Georges Koenig pare au plus pressé en faisant les réparations indispensables, mais très vite s’est posé le problème suivant : ou conserver la disposition existante de l’instrument ou le reconstruire dans sa disposition primitive puisqu’on connaissait la composition de l’orgue de 1717. C’est ainsi que naquit l’idée en plein XXe siècle de construire un orgue selon Dom Bedos. Ce projet soutenu par l’association des amis de l’orgue Delorme fondée en 1961 par Alfred Mahler, pharmacien de Sarre-Union et ami d’Albert Schweitzer, fut confié à Jean Georges Koenig qui le mena à bien en réalisant un magnifique instrument classique français. La composition est pour les manuels, semblable à celle de Delorme avec un larigot en plus au positif. La pédale aux normes modernes est un peu plus fournie ce qui permet l’exécution de la plus grande partie du répertoire européen du XVIIe –XVIIIe siècle. En 2000 l’orgue fut relevé par la maison Koenig qui remplaça la trompette de pédale de Géant par une trompette neuve, suivant les tailles prévues par Jean-Georges Koenig avec les anches achetées à l’époque. Tempérament : égal en 1967, légèrement modifié en 2000 pour favoriser les tonalités de Do et Fa, sans modifier la tuyauterie. Diapason 390 Hz (ton de chapelle français)


La composition

Grand-orgue 51 notes Positif 51 notes Pédale 30 notes
Bourdon 16 Montre 4 Flûte 16
Montre 8 Bourdon 8 Flûte 8
Bourdon 8 Nasard 2 2/3 Flûte 4
Prestant 4 Doublette 2 Sesquialtera 5 1/3 + 3 1/5
Grosse tierce 3 1/5 Tierce 1 3/5 Flûte 2
Nasard 2 2/3 Larigot 1 1/3 Bombarde 16
Doublette 2 Fourniture 3 rangs Trompette 8
Quarte 2 Cymbale 3 rangs
Tierce 1 3/5 Cromorne 8
Fourniture 4 rangs
Cymbale 3 rangs Accouplement pos/go Tirasse grand-orgue
Trompette 8
Clairon 4 Tremblant royal
Voix humaine 8
Dessus de cornet 5 rangs


Eglise protestante

Orgue de l'Eglise prostestante de Sarre-Union

Historique

1716 Construction de l’orgue par Augustin HARTUNG

Après accord (23/04/1716) avec Augustin Hartung, facteur d’orgue à Bad Durkheim dans le Palatinat , fut décidée la construction d’un instrument pour la toute nouvelle église luthérienne de Neu-Sarrewerden (1710). Ce, pour la somme de 480 Gulden et avec pour dédicace "zu Ehren des Grossen Gottes und Aufmunterung des Christlichen Herzen".
Dans l’enthousiasme d’alors l’on fit peu de temps après un avenant (18/02/1717) pour l’adjonction d’ un jeu supplémentaire (viole de gambe). Sans doute voulait-on donner ainsi le change aux catholiques de Bouquenom qui venaient de se doter du splendide orgue du frère Delorme.
Le soufflé(t) étant retombé, ce sont surtout les rats et les souris qui s’occuperont le plus de l’instrument par la suite (le grenier de l’église servant alors de remise à grains, les rongeurs y pullulaient).

1735 Réparation par Johann Adam DINGLER

Une première réparation dut donc être effectuée en 1735 par Jean Adam Dingler , facteur d’orgue originaire de Bouquenom, frère convers chez les dominicains de Nancy et ancien compagnon chez le mythique André Silbermann.

1754 Réparation par Peter RAACH de Trèves

En 1754, l’orgue était devenu tellement injouable qu’il fallut faire appel à un nommé Peter Raach, originaire de Trêves, et muni d’une solide recommandation de la paroisse de Sankt Arnuald.

1761 Reconstruction par François Adam HUBERTI

Hélas, il s’avéra que ce dernier passait plus de temps à l’auberge que sur son chantier et réussit même à abîmer ce qui ne l’était pas encore. Congédié comme "Pfuscher", ce dernier quitta précipitamment les lieux en "empruntant" au passage les outils qui lui avaient été confiés. Il ne restait donc plus qu’à reconstruire l’orgue.
Un facteur d’orgue itinérant, François Adam Huberti, originaire de Sarrelouis, venait de construire un orgue neuf pour le temple réformé de Neu-Sarrewerden (1759) à un prix raisonnable, et se trouvait sans engagement. Flairant la bonne affaire, c’est donc lui que les édiles solliciteront, d’autant plus que Jean André Silbermann de Strasbourg, consulté à l’époque, exigeait presque le double du prix annoncé par ce concurrent inattendu.
(C’est sans doute à ce même Huberti que l’on doit le magnifique buffet actuel, les ornements et les incurvations étant plus de 1761 que de 1717.)
Cet orgue "presque" neuf avait seize jeux et avait coûté 1400 Florins. Jean André Silbermann , sollicité pour expertiser le nouvel instrument et vraisemblablement dépité par son éviction, refusera de se rendre à l’invitation, « Ich ging aber nicht dahin ».

1794 Les révolutionnaires réduisent l’orgue au silence « en le condamnant par des planches »

Arriva la révolution française et son cortège de casseurs plus ou moins zélés. Les habitants de Neu-Sarrewerden, bien qu’étant acquis aux idées nouvelles n’étaient heureusement pas des jacobins forcenés. L’église étant réquisitionnée comme grange à foin l’on se contentera, le 24 Messidor de l’an II, de réduire l’orgue au silence en le condamnant par des planches, ce qui paradoxalement le préservera. Coût : 43 Livres, à payer par le citoyen pasteur Liebrich sur la cassette des aumônes.
Le culte sera rétabli quelques années plus tard et ce sera un dénommé Jean Erckmann qui assurera l’entretien de l’instrument jusqu’en 1841 au moins.
Jean Erckmann est issu d’une lignée d’instituteurs organistes réformés établis dans la région et dont le représentant le plus illustre sera l’écrivain Emile Erckmann, associé d’Alexandre Chatrian.

1852 Réparation d’urgence par Pierre RIVINACH

En 1852, l’on vît apparaître Pierre Rivinach, originaire de la région de Trêves (encore !), de retour d’Amérique (où il n’avait sans doute pas fait fortune !) et établi à Insming en Moselle. Ce dernier effectua une réparation d’urgence pour 1020 Francs.

1862 Reconstruction par Martin WETZEL

La "santé" de l’orgue allant néanmoins en se dégradant, le malheureux organiste Weber devenait l’auteur bien malgré lui de "couacs" et cornements divers à chaque office. Rivinach s’avérant incapable d’honorer ses engagements pour un relevage futur, le conseil de l’époque décida enfin de "casser la tirelire" et confia à Martin Wetzel de Strasbourg le soin de reconstruire l’orgue en 1862 en rajoutant au passage le positif actuel dans le soubassement du buffet. Bien entendu le facteur d’orgue devra récupérer tout ce qui peut l’être, y compris parfois l’irrécupérable !

1888 Réparation par Emile WETZEL et suppression de cinq jeux jugés « Völlig unbrauchbar »

En 1888, Emile Wetzel (fils du précédent et établi à Bergheim dans le Haut-Rhin) procédera, de fait, à de nouvelles et nécessaires réparations, l’orgue y perdra cinq registres "Völlig unbrauchbar !" .

1901

En 1901, sur les conseils du docteur Albert Schweitzer et d’Ernest Munch (Musikdirektor), il fut décidé de mettre l’orgue au goût du jour en lui installant une traction pneumatique et en lui donnant une composition "néo-classique". La maison Dalstein Haerpfer de Boulay sera chargée de l’opération pour la somme de 5230 Marks. Le buffet de l’orgue sera fort heureusement épargné dans cette course à la modernité.

1917

Les tuyaux de façade en étain sont réquisitionnés par les autorités allemandes, le métal refondu servant à fabriquer des munitions.

1929

Le facteur d’orgue Schwenkedel remplace la façade devenue manquante par de nouveaux tuyaux ( de mauvaise qualité !).

1971

La traction pneumatique ayant montré ses limites, l’orgue redevient impraticable. Ce sera Jean-Georges Koenig de Sarre-Union qui reconstruira l’orgue avec une traction mécanique traditionnelle et une console latérale (comme à l’origine). Son fils, Yves Koenig, complétera idéalement l’orgue en 1991 en y rajoutant les jeux manquants initialement au projet de 1971 mais dont l’installation avait été reportée sine die par manque de financement. L’orgue de l’église protestante de Sarre-Union semble avoir atteint à présent sa plénitude tant par l’élégance de son buffet que par sa palette sonore et la fiabilité de sa mécanique. Gageons que les ennemis traditionnels que sont les rats, l’humidité, la négligence et le chauffage à air pulsé n’affecteront pas son existence pour que ce vénérable et vivant objet du patrimoine continue à charmer ceux qui le jouent, ceux qui le voient et ceux qui l’écoutent…
Marc Lenjoint, le 15/09/2006

La composition

Grand-orgue 54 notes Positif 54 notes Pédale 30 notes
Montre 8 Bourdon 8 Soubasse 16
Bourdon 8 Montre 4 Octave basse 8
Prestant 4 Flûte à cheminée 4 Flûte 4
Gemshorn 2 Doublette 2 Posaune 16
Sesquialtera 3 rangs au sol2 Larigot 1 1/3
Plein-jeu 4-5 rangs Sifflet 1 II/I – I/P – II/P
Trompette 8 Dulciane 8 Tremblant doux

Les photographies sont l'œuvre de Yves Koenig